[Polémiques] Lorant Deutsch sait-il lire ? Le mystère des “milliers de familles musulmanes d’Afrique du Nord”

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Se pourrait-il que Lorant Deutsch ait délégué certaines de ses lectures ? Cela expliquerait certaines choses… © Flickr

La question peut paraître un peu provocatrice, mais je commence très sérieusement à me la poser. Elle me trottait déjà dans la tête à l’époque de Métronome, notamment suite à l’épisode de la datation du Louvre à l’époque de Clovis, basée sur une mauvaise lecture des écrits d’Henri Sauval. En effet, l’auteur du XVIIème siècle affirmait noir sur blanc que, pour lui, le Louvre ne pouvait être plus ancien que l’époque de Philippe Auguste [1]. Des éléments récents sont venus réactiver cette interrogation.

Il y a quelques jours, les pourfendeurs des “historiens de garde” ; Aurore Chéry, Christophe Naudin et William Blanc ; ont publié une tribune [2] sur le site internet du Huffington Post où ils s’en prennent, avec raison et force arguments, à la vision fortement teintée de références idéologiques d’extrême-droite de Lorant Deutsch concernant la bataille de Poitiers, en 732. L’acteur y a répondu avec véhémence sur le plateau d’Anne-Sophie Lapix lors de l’émission C à vous du jeudi 3 octobre 2013 [3]. Outre son point de vue sur la polémique, cette prise de parole nous apprend un fait très intéressant sur la genèse du chapitre “Le Croissant et le Marteau” racontant la bataille de Poitiers. De fait, vers 2’30″, Lorant Deutsch lève le voile sur une part de sa bibliographie. Il cite notamment une biographie de Charles Martel écrite par Jean Deviosse [4]. Curieux j’ai pu profiter de la profondeur du fonds de la médiathèque André Malraux de Strasbourg pour m’en procurer un exemplaire et donc vérifier les dires de Lorant Deutsch.

 

Jean Deviosse, un historien fiable ?

 

Avant d’en venir au fond du débat, il nous semble d’abord nécessaire de faire l’exégèse de l’ouvrage de Jean Deviosse, paru pour la première fois en 1978 et republié récemment, en 2006. Une rapide recherche internet ne m’apprend pas grand chose sur l’auteur donc je dois me contenter de la mention de la quatrième de couverture. Celle-ci affirme :

Jean Deviosse, historien du Moyen Age, fut l’un des premiers à contester le mythe de la “bataille de Poitiers” (La Bataille de Poitiers, Gallimard, avec Jean-Henri Roy). On lui doit également l’unique biographie d’un roi méconnu, Jean le Bon (Fayard).

A l’unique lecture du chapitre concernant la bataille de Poitiers (Troisième partie, chapitre I entre les pages 159 et 178 de l’édition de 2006) ainsi que la consultation de la bibliographie, il est possible de décerner plusieurs éléments intéressants sur la méthode de Jean Deviosse. De fait, sa bibliographie est rachitique, fragmentaire et avec de nombreux ouvrages qui sont déjà anciens, et ce même dans les années 1970. De fait, la moyenne d’ancienneté des références est d’au moins cinquante ans. En outre, de nombreux ouvrages cités en notes de bas de page manquent dans la bibliographie. Pour l’exemple je citerais la mention (note 19, p. 172) “Hitti, Précis d’histoire des Arabes, p. 79″ alors que la référence complète est absente, que ce soit dans la bibliographie générale ou propre à chaque chapitre.

Par ailleurs, Jean Deviosse semble adepte de l’affirmation sans fondement puisque à de nombreuses reprises il mentionne des événements sans apporter de caution bibliographique à son propos. Un exemple parlant se situe page 171 lorsque l’auteur explique :

Conjointement, l’activité arabe est intense en Méditerranée. La Sicile est conquise en 720, alors qu’en 724 tombent la Sardaigne, la Corse et les Baléares. Voilà qui ne marque guère un découragement de la part de l’Islam, après son échec sous Constantinople.

Il faut donc le croire sur parole, ce qui est assez gênant dans le domaine historique.

 

Lorant Deutsch l’affabulateur :

 

Attaquons nous désormais aux dires du comédien-auteur dans le chapitre “Le Croissant et le Marteau”. Pour cela, je m’appuie sur les extraits publiés dans la tribune sur le Huffington Post, l’article plus complet [5] paru sur le site leshistoriensdegarde.fr ainsi qu’une consultation des pages incriminées. Tout d’abord, on est saisi par l’extrême flou qui règne en ce qui concerne la datation. Le seul jalon chronologique présent est celui de 732-733, non écrit noir sur blanc mais donné par la mention de la bataille de Poitiers. Le lecteur est donc amené à penser que l’ensemble des événements racontés se sont déroulés autour de cette date. Cela ne pourrait être considéré que comme pinaillerie, mais cela a de l’importance. En effet, lorsque Lorant Deutsch explique (p. 224) que :

Coran dans une main, cimeterre dans l’autre, ils [les Sarrasins] ont envahi Narbonne et sa région, massacrant les défenseurs de la ville, envoyant femmes et enfants en esclavage, offrant terres et habitations à des milliers de familles musulmanes venues d’Afrique du Nord.

il ne faut pas y voir une référence à l’expédition d’Abd el-Rahman en 732, mais à celle d’El Samh en 719. En effet, comme on pourra le voir ci-après, au moment de la bataille de Poitiers, Narbonne est déjà gouvernée par les musulmans, ce qui rend toute nécessité de conquête totalement superflue. Idem, lorsque le comédien affirme (p. 224) :

Puis ils ont voulu attaquer Toulouse mais le duc Eudes, maître de l’Aquitaine, a su intervenir, repousser l’assaillant, sauver la ville.

Une nouvelle fois, il s’agit d’une référence explicite à une autre expédition du même El Samh en 721.

Le moment où cela devient quasiment comique est atteint avec la lecture de Jean Deviosse. De fait, il est clair que Lorant Deutsch ne pouvait pas ne pas connaître les jalons chronologiques mentionnés précédemment puisque Jean Deviosse, sa source proclamée, en fait clairement état (p. 169-171) :

Quant aux intentions des successeurs de Musa Ibn Nosair, il est impossible de les percer à jour puisque tous ceux qui guerroyèrent vont trouver la mort en pays franc. Cependant, deux faits. El Samh Ibn Malik al Khawlani, à peine arrivé en Espagne (719), part en expédition contre la Narbonnais, que les Arabes occuperont pendant quarante ans. Cette conquête était le prélude à une autre. Le même El Samh, en 721, envahit la Gaule. Les textes prouvent assez qu’il ne s’agissait pas là d’une razzia. Notamment, les Arabes traînaient avec eux des machines de siège. Mais El Samh trouva la mort sous Toulouse.

[…] Après 717 (date de la bataille de Constantinople ndlr), l’Europe était encore menacée. Deux ans plus tard, El Samh conquiert la Septimanie (la région de Narbonne ndlr), base d’opérations futures contre la Gaule. Les musulmans, outre l’occupation militaire, font même venir d’Afrique des familles entières avec femmes et enfants pour élargir les bases de cette occupation.

Au passage, le lecteur un tant soit peu critique regrettera avec amertume l’absence de mention de sources attestant l’arrivée effective de ces familles dans le récit de Deviosse… Ici Lorant Deutsch ne fait que reprendre à son compte une assertion colportée par Jean Deviosse, ce dernier ne se fondant sur aucun élément concret. Tout cela ressemble bien donc à un mythe historiographique.

Mais là n’est pas encore le plus déroutant. En effet, le comédien sait également se montrer inventeur. Page 225 il explique qu’ :

Abd al-Rahman réunit alors en Espagne une invraisemblable force de frappe destinée à envahir le royaume franc : des centaines de milliers d’Arabes et de Berbères, formant une armée massive suivie par une population d’hommes, de femmes, d’enfants et d’esclaves pressés de prendre possession des futures terres occupées.

Outre le fait que la distinction conquête/razzia pour cette expédition est, encore aujourd’hui, un objet âprement débattu par la recherche, et ce même du temps de Jean Deviosse, on s’étonne de ne pas trouver, dans la biographie de Charles Martel, de mention de ces civils suivant l’armée arabe en campagne pour en découdre près de Poitiers. Pour s’en convaincre citons l’ensemble du récit de Jean Deviosse à propos de l’expédition d’Abd el-Rahman en 732. Celui-ci se situe entre les pages 161 et 168. Attention le passage qui va suivre va être (très) long, mais, par honnêteté intellectuelle, j’ai considéré qu’il était nécessaire de citer in extenso. Ainsi aucun procès en montage partisan ne pourra être intenté.

Au printemps 732, un ou deux mois suffirent à Gedhi ben Zeyan pour ramener à Abd er-Rahman la tête de Munuza, vaincu presque sans coup férir. A ce moment, alors, le wali monte avec soin son agression contre les Gaules. Avec soin, puisque pour la première fois, l’attaque contre la “Grande Terre” sera double. Elle se déclenche et par voie de terre et par voie de mer ; l’Anonyme de Cordoue et la Chronique de Moissac nous en donnent l’assurance formelle. Il semble, à l’analyse, que cette invasion eut une importance beaucoup plus grande que les expéditions que les expéditions de razzia qui fatiguaient le Languedoc, la vallée du Rhône et la Bourgogne depuis l’année 719.

On peut suivre la progression des deux corps expéditionnaires lancés contre la Gaule. Ils opèrent un véritable encerclement de l’Aquitaine, de la Provence et de la Bourgogne qui se trouvent enfermées dans une sorte de tenaille.

Après son débarquement, le corps d’armée arabe, à l’est, emprunte un itinéraire qu’on peut démarquer. Négligeant les récits, sans doute critiquables, des chroniqueurs et hagiographes, nous n’en retiendrons, comme seule vérité, que les indications géographiques qu’ils nous donnent. Les musulmans franchissent le Rhône, ravagent la Narbonensis Secunda et la Viennensis, et remontent la vallée sur la rive droite du fleuve. Ils atteignent Vienne, Lyon, que les écrivains arabes nomment Loudun, puis Mâcon, Chalon-sur-Saône, Beaune et Autun. Ensuite ils s’avancent vers le nord jusqu’à Saulieu, Bèze et, à une faible distance de Dijon, bifurquent vers le nord-ouest pour descendre la vallée de l’Yonne. Ils assiègent et enlèvent Sens. El Maccary, historien arabe, commente l’expédition. “Dieu avait jeté la terreur, dans le sein des infidèles. Si quelqu’un d’eux se présentait c’était pour demander merci. Les musulmans prirent du pays, accordèrent des sauvegardes, s’enfoncèrent et s’élevèrent jusqu’à ce qu’ils arrivassent à la vallée du Rhône. Là, s’éloignant des côtes, ils s’avancèrent dans l’intérieur des terres.”

Après la prise de Sens, nous perdons totalement la trace de cette première armée. Nous savons seulement par un conteur arabe que “le vent de l’islamisme soufflait dès lors de tous les côtés à la fois”. En effet, dans le même temps, Abd er-Rahman avait franchi les Pyrénées et soumis l’Aquitaine à coupe réglée. Les détails sur son avance n’importent guère. Le seul fait essentiel, après la chute de Bordeaux, est sans conteste le combat qu’il engage contre Eudes d’Aquitaine au-delà de la Dordogne ou de la Garonne. La rencontre tourne à la déroute complète des Aquitains, Eudes ne devant son salut qu’à la fuite. Bataille sanglane, puisque “Dieu seul connaît le nombre des morts et des mourants”, écrit l’Anonyme de Cordoue. Plus rien, désormais, ne saurait s’opposer à la ruée arabe. Non seulement l’Aquitaine est à merci, mais la route vers le nord est ouverte, sans défense. Abd er-Rahman se lance à la poursuite d’Eudes et, chemin faisant, décide de pousser jusqu’à Tours pour piller la célèbre basilique Saint-Martin. Il en apprend l’existence en s’enfonçant davantage dans le pays. Il ne peut en être autrement. La méconnaissance de la Gaule par les Arabes est telle qu’ils ignorent tout de l’ “église du bienheureux Martin”.

Jusqu’alors, l’invasion procède d’une réussite totale. Le butin accumulé est considérable. Un épisode exemplaire le prouve ; nous le trouvons dans les sources arabes. Un seigneur aquitain ayant été tué, le pillage de ses biens rapporta à chaque soldat musulman force topazes, hyacinthes et émeraudes. Donc, si nous sommes en présence d’une razzia, le but est déjà atteint bien avant Poitiers. Or, Abd er-Rahman manifeste peu d’empressement à retourner en Espagne. L’épisode du “pied” en or, relaté par el Hakam, est significatif à ce propos.

Mais laissons pour un temps, Abd er-Rahman fouler l’Aquitaine pour nous préoccuper de l’attitude de ses ennemis, Eudes, le fuyard vaincu, et Karl dont il ignore encore tout. Le comportement du duc d’Aquitaine est symptomatique. Lui, protagoniste des ces événements, ne croit pas à une razzia, c’est-à-dire un mouvement de flux et de reflux de l’envahisseur. D’une façon évidente, il est désemparé par la perte de ses Etats et assommé par la catastrophe qui l’atteint. Sinon, comment expliquer le lourd sacrifice qu’il s’impose en allant implorer l’aide de Karl, son implacable ennemi. L’humiliation était forte, le prix du concours élevé. Seule l’idée d’une perte définitive de l’Aquitaine pouvait le pousser à cette extrémité.

L’attitude de Charles Martel, qui prend la décision d’intervenir en personne contre les Arabes, indique que le point de vue du chef austrasien rejoignait celui du duc Eudes. Karl se serait-il déplacé lui-même avec une armée pour réduire une vague bande de pillards prête au repli ? Il ne pouvait pas même être tenté par le sac de la Guyenne rendue exsangue par les rapines et les ravages de l’envahisseur. Pour lui aussi, l’affaire est sérieuse ; à tel point qu’il dégarnit ses frontières de Germanie. A tort ou à raison, les contemporains redoutent l’annexion de l’Aquitaine qui pourrait subir le même sort que l’Espagne wisigothique. Aussi Charles Martel rassemble-t-il un grand nombre de guerriers, venus d’horizons différents, soldats, que l’Anonyme de Cordoue qualifie d’ “Européens”, et dont un auteur arabe assure qu’ils parlaient diverses langues. Si l’attaque arabe contre les Gaules fut bien montée, la réplique franque ne fut pas moins bien préparée.

En octobre 733, les deux armées se trouvent en présence. L’incendie de l’église Saint-Hilaire, bâtie hors des murs de la ville de Poitiers, représente la dernière agression arabe avant la bataille.

On a situé, avec une logique rigoureuse, le lieu de l’affrontement dont aucune chronique ne parle. Mais la logique n’est pas suffisante en Histoire et cette localisation vraisemblable n’est pas certaine. Quelques-uns ont profité de cette ignorance où nous sommes tenus pour tirer des conclusions pour le moins hâtives. Bataille de peu d’importance, disent-ils, puisque nous n’arrivons pas à la placer géographiquement ; aucun ossuaire, aucune chapelle, aucune stèle ne commémorant l’endroit de ce combat oecuménique. L’argument ne tient pas. On peut faire la même constatation à propos de la bataille de Vouillé (Poitiers) remportée, avec l’aide du Ciel, par Clovis en 507. Autre exemple ? La détermination de l’endroit exact de la rencontre entre Tarik et Roderic a donné lieu à maintes discussions, et pourtant cette bataille décida du sort de l’Espagne. L’absence de témoignages matériels n’infirme rien, comme on a pu l’observer au cours de recherches sur les emplacements très précis des combats de la guerre de Vendée pendant la Révolution : on a presque rien trouvé.

Ici ou là, quelle importance d’ailleurs pour l’Histoire générale, constate Ferdinand Lot ?

Une question paraît plus essentielle quoique surprenant. Comment les combattants se sont-ils rencontrés et pourquoi les Arabes ont-ils accepté le combat ?

Autrefois, les hommes de guerre à la recherche des adversaires, craignaient surtout de ne pas les trouver. Hors des voies romaines, les communications étaient malaisées. Pas de cartes, les guides du pays représentaient la seule source d’information. Faute de guide, on sollicitait le secours divin, tels Clovis, avant le combat contre Alaric, roi des Wisigoths.

On pourrait croire que la bataille de Poitiers a été une rencontre de hasard, mais cette croyance serait l’aveu d’une enquête inachevée. Tout indique un rendez-vous “convenu”. Les deux armées, avant de s’entrechoquer, restent sept jours face à face, s’interrogeant avec anxiété sur l’issue du combat. L’Anonyme l’assure formellement. Les Arabes donc, de propos délibéré, désirent l’engagement, sinon, ils auraient pu décrocher aussi facilement puisqu’ils l’ont fait dans la nuit qui suivit le combat, et sans doute, dans de biens meilleures conditions. Mais alors nous débouchons sur une anomalie. Pourquoi les guerriers arabes acceptent-ils de livrer bataille, eux, qui n’avaient été, prétendument, rassemblés que pour une razzia ? Leur attitude est tout à fait contraire au principe même du rezzou. Le repli arabe aurait dû être d’autant plus rapide que le butin était plus fructueux. En se plaçant dans l’optique de la razzia, il est déjà anormal que les Arabes soient restés si longtemps en Gaule alors que leurs chariots étaient encombrés de leurs prises, et il paraît alors aberrant, si la razzia était leur but, qu’ils consentent à combattre. Un autre argument nous est fourni par un auteur arabe. Ce n’est pas sans appréhension, écrit-il, qu’Abd al-Rahman s’apprêtait à livrer bataille aux Francs. Il était effrayé du relâchement qui, par suite des immenses richesses que ses soldats traînaient après, s’était introduit dans leurs rangs. Il voulut même, un instant, leur ordonner de sacrifier une partie de leur butin, mais il craignit de les mécontenter en leur imposant le sacrifice de leurs trésors, fruits de tant de fatigues. Voilà donc le chef d’une expédition de pillage qui songe à détruire le butin, objectif essentiel de l’opération, pour livrer une bataille hypothétique à laquelle rien ne l’oblige !

Outre l’absence d’une mention de ces fameuses familles musulmanes venues coloniser l’Aquitaine, on notera également l’invention de l’appui de soldats païens, ces derniers n’étant mentionnés à aucun moment par Jean Deviosse. De fait, Lorant Deutsch explique (p. 225-226) :

Le chef franc doit, lui aussi, mobiliser une puissante armée. Les soldats d’Austrasie, bien qu’expérimentés et disciplinés, ne suffiront pas à contenir les houles musulmanes. Alors, Charles se hâte de conclure des accords avec tous les bouillonnants peuples germaniques, les Alamans, les Saxons, les Thuringiens. Il réunit ces guerriers sous la bannière du Christ, et si certains d’entre eux sont païens, ça ne fait rien !

Enfin, on conviendra également, avec l’auteur de ce compte-rendu du livre de Salah Guemriche [6] – même si ce dernier le regrette – , que Jean Deviosse n’a pas mis en lumière les différences religieuses des protagonistes et donc que le récit de “l’alliance sous la bannière du Christ” des chrétiens et des païens contre les musulmans, est, encore, une invention deutschienne.

 

Conclusion :

 

Pour conclure, non Lorant Deutsch n’a pas “rien inventé”, comme il l’affirme dans C à vous. C’est une sorte de bricoleur de l’Histoire. Il prend des pièces glanées ça et là, qui lui paraissent intéressantes et il les assemble. Toutefois, à part par licence artistique, un amateur de loisir créatif veille à ce que son ouvrage conserve une cohérence d’ensemble. En Histoire Lorant Deutsch se fiche de l’ordre des événements, de la chronologie, de leur complexité et compose, pour le bien de son récit, une nouvelle histoire-fiction en inventant les faits ou les détails qui font défaut dans la réalité telle que nous la comprenons à travers les sources d’époque. Si cela pourrait paraître sympathique dans une oeuvre à caractère fictionnelle, cela est impardonnable dans un ouvrage d’histoire. In fine Lorant Deutsch n’est pas historien, mais, au mieux, un conteur d’histoires à dormir debout.


[1] Sauval H., Histoire et recherches des antiquités de la ville de Paris, tome 2, Paris, 1724, p. 7. Le livre est disponible sur le site internet de l’équipe Architectura de l’université de Tours.

[2] Naudin C., Blanc W. et Chéry A., “Lorànt Deutsch et le mythe de l’invasion musulmane”Le Huffington Post (30 septembre 2013) (Dernière consultation le 5 octobre 2013)

[3] “Polémique sur son livre “Hexagone” et la bataille de Poitiers : Lorànt Deutsch répond à ses détracteurs”Le Huffington Post (4 octobre 2013) (Dernière consultation le 5 octobre 2013)

[4] Deviosse J., Charles MartelParis, 2006 (1ère édition 1978)

[5] Naudin C., “LORÀNT DEUTSCH, LA CROIX ET LE CROISSANT”Leshistoriensdegarde.fr (1er octobre 2013) (Dernière consultation le 5 octobre 2013)

[6] Abbon, “A propos de Charles Martel : un exemple de désinformation historique”Polémia (18 juin 2010) (Dernière consultation le 5 octobre 2013)

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